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mercredi 13 décembre 2023

Les questions étincelles

Pourquoi l'estomac ne se digère-t-il pas lui-même ? Voilà le prototype de ce que je nomme des "questions étincelles", ces cadeaux que l'on fait à nos amis, et qui ont pour but que nos amis aient des pensées pour nous, que se crée une communauté immatérielle de la pensée, du soin d'autrui... 

Evidemment, cette idée a des rapports avec le concept des "belles personnes", que j'avais développé naguère : ces personnes qui poussent l'amitié qu'elles vous portent en vous surprenant, chaque rencontre, par de nouvelles idées qu'elles vous soumettent. Elle a sa part de naïveté qui lui fait échapper à la rouerie de trop de personnes que l'on prétend intelligentes, mais qui, tels les rhéteurs dénoncés par Platon, sont des esprits faux, méchants, malhonnêtes, en un mot. 

Mais on se souvient que je propose de garder en tête que "le summum de l'intelligence, c'est la bonté et la droiture". Revenons aux questions étincelles. Je les oppose aux questions étouffoirs, ces questions dont la réponse est factuelle, à ras de terre, cette victoire des géants contre les dieux de la mythologie alémanique, cette poussière du monde de Shitao. 

J'insiste : les questions étouffoirs sont des transmissions d'information sans plus de valeur que les bits qui les codent. Quelle heure est-il ? Comment ça va ? Vous avez vu ce film ? Vous avez lu ce livre ? Des conventions, qui révèlent, en creux, que nos interlocuteurs n'ont pas d'égard pour nous, en un mot qu'ils ne nous aiment pas. 

Sortons de la fange, redressons-nous, et repartons dans le clair azur de notre monde de questions étincelles. Ce sont les questions qui nous font penser, les questions qui nous poussent à entreprendre, à explorer, à travailler... 

C'est ainsi que je vois, idéalement, une thèse de sciences de la nature : le directeur de thèse pose une question, des questions, et le doctorant fait son chemin, en quête de réponses... ou pas. Disons seulement "en quête", et cela suffira. 

Les questions étincelles : des cadeaux que l'on nous a fait, des échos de ce "Enseigner, ce n'est pas emplir des cruches, mais allumer un brasier". Elles sont, je crois, la base d'un bon enseignement : celui qui n'occupe pas inutilement les emplois du temps, celui qui fait confiance aux étudiants, qui iront sur un chemin balisé, mais qui marcheront d'eux-mêmes, sans qu'on les tire vers l'abattoir. On le voit, je ne mégote pas avec les métaphores, pour discuter cette question des questions étincelles, mais c'est que je veux y mettre de la vie, du... feu !

mardi 17 septembre 2019

La question des questions : étincelle ou pas ?

Un collègue qui prépare ses enseignements imagine, sur mes conseils, d'attirer ses élèves par des expériences qui leur donneront ensuite l'envie d'aller plus loin dans sa discipline. Les expériences sont déterminées, sur la base de la surprise, de la gourmandise, que sais-je, et la question est donc maintenant, par des questions, de les inciter à aller plus loin, à partir du tremplin expérimental/culinaire initial.
Je le vois qui cherche des séries de questions pour conduire les élèves dans des directions qu'il souhaite,  et l'on comprend que son questionnement vaut pour toutes les sciences de la nature que sont la chimie, la physique, la biologie...

Bref, la question se pose donc de savoir quelles questions poser.

Bien sûr, on peut décrire les phénomènes que l'on observe quand on fait les expériences et s'interroger sur tous les termes qui apparaissent lors de ces description : cela correspond environ  à ce que j'avais proposé dans la "méthode du soliloque".
Mais je me souviens aussi avoir proposé une classification des questions en questions étouffoir et questions étincelle,  les noms de ces deux types de questions étant choisis évidemment pour montrer que certaines questions sont plus fructueuse que d'autres. Des questions étouffoir : on étouffe l'intérêt. Des questions étincelles : on allume un brasier de connaissance !
Et c'est ainsi que j'ai les deux exemples suivants. Si je demande à quelqu'un l'heure qu'il est  et qu'il me répond, la discussion s'arrête ; c'était là une question étouffoir. En revanche, si je fais observer que l'estomac, fait de viande, digère la viande, et si je demande alors pourquoi l'estomac ne se digère pas lui-même, alors j'ai posé une question qui ouvre la discussion, une question étincelle.

La question que je pose maintenant est de savoir comment produire de telles questions fructueuses.

Observons que les paradoxes ont un rapport avec les questions étincelles. D'ailleurs, l'exemple de l'estomac était paradoxal. Tout comme le paradoxe d'Olbers, à propos de l'obscurité du ciel nocturne. Toutefois la vie ne se réduit pas aux paradoxes, et il y a mille questions intéressantes sans être paradoxales : pourquoi le ciel est-il bleu ? Pourquoi les pommes tombent-elles, au lieu de quitter l'arbre vers le haut ?
Mon problème, avec cette question que je me pose sur les questions étincelles, c'est que je vois des questions merveilleuses partout. Par exemple, à la fin de l'été, les feuilles qui étaient vertes jaunissent ; pourquoi ? Je vois le soleil se lever chaque matin du même côté de ma maison ; pourquoi ? Et  pourquoi de ce côté-là ? Je vois des trous dans les feuilles de mes plantes ; pourquoi ?
On a compris que les phénomènes naturels sont une source inépuisable de questions, qui, toutes, peuvent me conduire vers les études scientifiques. Bien sûr, on peut discuter de savoir si la science est dans le pourquoi ou dans le comment, mais c'est là une subtilité qui m'intéresse moins que d'observer l'enfant interagir avec l'adulte, à ce jeu des questions qui s'enchaînent à l'infini: "Et pourquoi... Et pourquoi... Et pourquoi...". Ici, l'art de l'adulte consiste à aider l'enfant à se lancer lui-même dans des explorations...  ce qui est difficile, car précisément, la question n'est pas le pourquoi, mais l'interaction avec l'adulte.
Oui, il y a une difficulté à savoir ne pas tuer la curiosité, mais se préserver un peu, et, si possible, conduire l'enfant à de l'autonomie, à l'apprentissage de l'activité solitaire de l'étude.
Cette analyse peut nous être utiles, pour notre réflexion sur les questions étincelles : et si la question était moins la question, étincelle ou étouffoir, que la question des relations entre le professeur et les élèves ? On l'a vu, toute question est rapidement étincelle... même  jusqu'à la question que je prenais comme exemple pour les questions étouffoir. Car quelle heure est-il ? Midi. Oui, mais midi exactement ? Et puis, un midi légal ou un midi solaire ? Et puis, avec quelle certitude sait-on qu'il serait midi ? Et ainsi de suite. Il n'y a de question étouffoir que si l'un des deux protagonistes refuse la relation, et l'on en arrive à conclure que c'est la relation qui est à construire, avec les questions !

Une fois de plus, je suis heureux de voir un symptôme me conduire à la maladie. Le symptôme n'a pas d'autre intérêt que d'être un symptôme, et c'est à moi de m'en saisir pour arriver à mieux. Au fond, la question des études est celle-là : ne pas étudier avec désinvolture, mais, au contraire, avec l'envie d'étudier. Sans cette envie, les études sont du gaspillage de temps et d'énergie, pris à des relations de qualités.
Chérissons ces dernières.

dimanche 22 mai 2016

Vive les questions étiincelles

Le blog de Hervé This : http://www.agroparistech.fr/1-A-propos-de-ce-blog.html->http://www.agroparistech.fr


Quelle heure est -il ?  Sept heures trente-deux. Le dialogue a commencé, et il s'est arrêté. Ce n'était pas une bonne question pour encourager une discussion, telle que nous en souhaitons avec les amis. Et voilà pourquoi, si, effectivement, les questions appellent des réponses, il faut distinguer les questions étouffoirs et les question étincelles.




La suite sur http://www.agroparistech.fr/Les-questions-sont-des-promesses-de-reponse-faut-il-tenir-ces-promesses-Vive.html