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mardi 19 octobre 2021

Le "saucissonnage" des publications

A propos de réflexions sur l'intégrité scientifique,  je tombe sur une discussion relative au "saucissonnage" des articles.

Les auteurs de cette expression considèrent que c'est une faute de publier de nombreux articles peu différents, sauf un élément mineur... et évidemment je suis approximativement d'accord avec eux.

Mais oublions les cas pathologiques pour se préoccuper des cas généraux. D'abord la question de ce saucissonnage est tout en nuances, car même quand on est honnête, on hésite sans cesse entre publier de gros manuscrits, transmettant une foule de rrésultats, de données, d'interprétations (cela fait des textes indigestes, trop denses, que personne ne lit bien) et de  petits articles courts, concis, focalisés.
Pour presque chacun de mes manuscrits, j'hésite entre ces deux possibilités !

On voit d'ailleurs à la façon dont je formule la question combien je suis plutôt en faveur des petits articles concis et bien faits, mais pourquoi ?

Pas pour augmenter mon nombre de publications, ce dont je me moque  parfaitement (puisque c'est la production scientifique qui m'intéresse), mais surtout parce que la division en petits morceaux facilite, suscite même, les interprétations. Si nous partons d'un résultat, d'un petit groupe de données, et que nous cherchons des interprétations, nous aurons au total plus de ces dernières... avec de surcroît la possibilité de chercher ensuite des synthèses, donc du méta-méta-résultat, en quelque sorte.

Bref, je ne veux pas manquer une occasion de me stimuler créativement, de me lancer sur des calculs qui feront voir dans les données autre chose que des nombres.

Sans compter que je ne suis pas très intelligent, et que, pour moi (comme pour les autres en réalité), les petites bouchées sont plus facile à absorber que les grosses.
Mais je le répète : il faut se concentrer sur le contenu, pas sur la forme. Et publier point à point conduit à mieux évaluer le chemin que l'on parcourt, nous oblige à imaginer plus que ce que nous faisons, nous donne du temps pour maturer des idées plus difficiles.
 
D'ailleurs, c'était la stratégie de Pierre-Gille de Gennes, qui partait fréquemment le vendredi soir avec une pile de résultats, et revenait le lundi avec un projet de publication et les calculs correspondants.
C'était aussi la stratégie de Louis Pasteur, un homme que je n'aime pas, mais qui, même s'il a répété jusqu'à des paragraphes entiers de communication en communication, a avancé comme un rouleau compresseur scientifique, avec pugnacité.
Je le répète : Pasteur s'est beaucoup répété, mais ses publications apportent toutes quelque chose, et c'est cela qui compte, non ?
Bien sûr, il n'a pas été honnête rhétoriquement, n'a pas reconnu tous les apports, s'est mis en avant de façon exagérée, n'a pas toujours utilisé son intelligence avec toute la droiture qu'on aurait pu souhaiter, mais ses publications (je parle surtout de la période 1846-1850) ont fait avancer son travail vers la solution de grands mystères.

Enfin, je concluerais qu'il en va ici comme des teintes comprises entre le noir et le blanc  : il y a toutes les graduations de gris, et il faut évidemment s'efforcer d'être du bon côté... en conservant cette idée forte : le summum de l'intelligence, c'est la bonté et la droiture.

lundi 24 juillet 2017

Intégrité et théorisation


Quelles sont les valeurs de la science ? L'objectif est partagé : chercher les mécanismes des phénomènes. Et, pour cela, aucune malhonnêteté n'est possible. Par exemple, inventer des données qui n'existent pas est idiot, parce que c'est un acte social et qui ne rapproche pas de l'objectif. Ou bien encore plagier : ce n'est pas ainsi que l'on se rapproche de l'objectif. Utiliser des méthodes inappropriées ou désuètes ? Là encore, ce n'est pas faire ce que l'on désire, donc c'est idiot. Bref, vu l'objectif, qui n'est pas social, ce n'est pas étonnant que la loyauté la plus grande soit de mise.

Loyauté ? Intégrité ?
Loyauté ? Fidélité manifestée par la conduite aux engagements pris, au respect des règles de l'honneur et de la probité.
Probité ? Droiture qui porte à respecter le bien d'autrui, à observer les droits et les devoirs de la justice.
Honneur ? Principe moral d'action qui porte une personne à avoir une conduite conforme (quant à la probité, à la vertu, au courage) à une norme sociale et qui lui permette de jouir de l'estime d'autrui et de garder le droit à sa dignité morale.
 Intégrité ?  Caractère, qualité d'une personne intègre, incorruptible, dont la conduite et les actes sont irréprochables.

Je propose de méditer ces quatre termes, en relation avec les sciences de la nature, mais voici comment le physicien américain Richard Feynman a décrit l'approche informelle de communication des principes de base des sciences en 1974, lors de son discours à l'Institut de technologie de Californie (Feynman, 1985, 311-312):

 "Il y a une idée que nous espérons tous que vous avez appris, lors des cours de science à l'école  -nous n'avons jamais explicitement dit ce que c'est, mais nous avons seulement espéré que vous la trouveriez à partir de tous les exemples de recherche scientifique... C'est une sorte d'intégrité scientifique, un principe de pensée scientifique qui correspond à une sorte d'honnêteté extrême - une sorte de fondation absolue. Par exemple, si vous faite une expérience, vous devez rapport tout ce que vous pensez qui peut la rendre invalide - et pas seulement ce que vous pensez qui va bien ; vous devez évoquer d'autres causes qui pourraient expliquer vos résultats différemment de la façon dont vous croyez devoir le faire ; et vous devez évoquer des choses que vous pensez que vous avez éliminé lors d'autres expérience, afin que personne ne puisse dire que vous les avez éliminées.
Il faut donner des détails qui pourraient faire douter de votre interprétation, si vous en avez. Vous devez vous efforcer d'expliquer tout ce qui pourrait être une cause d'erreur de votre part. Si vous faites une théorie, par exemple, et si vous la publiez, vous devez rassembler tous les faits qui vont à son encontre, à coté des faits qui la supportent. En résumé, l'idée est d'essayer de donner toutes les informations qui aideront les autres à évaluer votre contribution, et non pas seulement l'information qui pousse le jugement dans une seule direction".